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Histoires de Bretagne

Un blog d'Erwan Chartier-Le Floch

Trésors archéologiques en centre Bretagne

Publié le 30 Juin 2018 par ECLF in Archéologie, Histoire de Bretagne

Trésors archéologiques en centre Bretagne
Trésors archéologiques en centre Bretagne

 

 

 

 

 

 

 

Dans les années 2000, une opération d’inventaire dans le pays du centre ouest Bretagne a permis de découvrir des dizaines de sites archéologiques qui éclairent sous un jour nouveau le passé de cette région aujourd’hui dépeuplée, mais également toute l’histoire de Bretagne. Petit retour sur la question à quelques jours de l'ouverture du centre de valorisation archéologique de Carhaix

Des mégalithes enfouis dans les bois, une ville fortifiée gauloise, l’une des plus grandes cités romaines de l’ouest de la Gaule, des palais du haut Moyen Âge… Les recherches archéologiques nous dévoilent un centre Bretagne au passé étonnamment riche, contrastant avec l’image actuelle d’un pays dépeuplé et privé de grands centres urbains.

A la fin des années 2000, à l’instigation du Service régional de l’archéologie, du conseil régional et du pays, une importante opération d’inventaire a permis de recenser plusieurs dizaines de nouveaux sites, confirmant les découvertes des années précédentes. Elle venait également équilibrer un manque, les fouilles préventives étant plus fréquentes dans les zones urbaines ou le littoral. En résumé, on trouve plus de sites à Rennes ou dans le Morbihan puisqu’on y construit plus. Ce qui ne signifie en rien que le centre Bretagne a été un désert autrefois. Bien au contraire, c’est une histoire passionnante qui surgit de terre.

 

Des haches pour manger la forêt

Si les traces du Paléolithiques restent pour l’instant ténues, la présence humaine est attestée au Mésolithique, vers 10 000 avant notre ère. Le paysage est alors fort différent puisqu’une période de glaciation prend fin. Les hauteurs du centre Bretagne sont alors situées à 500-600 mètres au dessus du niveau de la mer. La végétation est très dense, des forêts qu’on pourrait rencontrer aujourd’hui en Scandinavie. Des groupes de chasseurs-cueilleurs occupent le territoire, en témoignent un important campement sur une presqu’île du Yeun Elez.

Bien des millénaires plus tard, l’agriculture se développe au Néolithique. Les hommes construisent des mégalithes pour marquer le territoire où enterrer leurs défunts. Ils défrichent, « mangeant » littéralement les forêts grâce à des haches de pierre polie. A Plussulien (22), ils exploitent ainsi une carrière de dolérite pour fabriquer ces instruments. Pendant plus de deux milles ans, des haches y sont fabriquées que l’on retrouve aujourd’hui dans toute la péninsule et jusqu’en Angleterre ou en Allemagne.

 

Bronze et fer

Il y a quatre mille ans intervient une nouvelle révolution technologique avec le travail des premiers métaux. Riche en étain et possédant des gisements de cuivre, la péninsule armoricaine s’inscrit dans les grandes civilisations de l’âge du Bronze européen.  C’est à Saint-Ili qu’est intervenue la plus étonnante découverte il y a quelques années. On y a mis au jour un énorme chaudron de bronze autour duquel étaient disposées une douzaine d’épées. Ils sont actuellement exposés au musée de Bretagne à Rennes.

Quelques siècles plus tard, au vie siècle avant notre ère, la civilisation celtique se diffuse en Armorique comme dans tout le reste de l’Europe occidentale. L’un des plus importants sites a été fouillé pendant une vingtaine d’années à Paule. A l’origine, il s’agit d’une importante ferme située au croisement des grands axes qui traverse la péninsule. Puis le site se fortifie, au point de devenir une petite agglomération, protégée par plusieurs lignes de remparts. Célèbre pour les statuettes gauloises découvertes, Paule témoigne de la puissance de l’aristocratie gauloise des derniers siècles avant notre ère.

 

 

Carhaix, la petite Rome

Des guerriers gaulois qui sans doute conserver une partie de leurs prérogatives après la conquête romaine. La plupart demeurent propriétaires de nombreuses terres, mais ils déplacent leurs résidences principales dans la nouvelle ville, Vorgium-Carhaix qui a pu compter entre quinze et vingt milles habitants dans l’Antiquité. On sait ainsi que jusque vers 280 après J.C., on vient pratiquer des cérémonies religieuses autour des sépultures gauloises de Paule. A Carhaix, une petite Rome sort de terre aux premiers siècles de notre ère. Des rues ordonnées, pavées de riches demeures comme la domus de l’hôpital ou sur les terrains Le Manac’h qui abritent le centre d'interprétation archéologique, ouvert en juillet 2018. Symbole de prestige pour la cité, un aqueduc est construit pour amener l’eau courante dans l’agglomération. Les travaux sont considérables pour acheminer le précieux liquide depuis Paule. Une colline est ainsi percée sur plus de 800 mètres. On y voit encore les marques des travailleurs romains. Un pont aqueduc termine le trajet à l’entrée de la ville.

 

Aux origines de la Bretagne

A la fin de l’Antiquité, Carhaix connaît une nouvelle phase de développement alors que les autres agglomérations armoricaines se rétractent derrière des murailles.  Mais c’est sans doute pour la période du haut Moyen Âge breton que les récentes recherches ont été les plus impressionnantes. De cette époque mal connue, plusieurs sites ont pu être étudié. A Kergoustois, près de Carhaix, où une importante ferme est construite en réutilisant des matériaux romains. A Paule, en contrebas de l’agglomération gauloise, un petit manoir est édifié au viie siècle. Construit en pierres, avec des fenêtres en verre et une surface au sol de près de 150 m2, il est la résidence de personnages importants. Et on ne peut s’empêcher d’imaginer qu’il s’agit peut-être des descendants des fondateurs du site, un millier d’années auparavant… Une chapelle et un fragment de ce qui pourraient être un livre religieux, comportant un décors d’un style évoquant les îles britanniques y ont également été mis au jour. Plusieurs forteresses de l’époque ont pu être fouillées et font progresser nos connaissances sur cette période où les Bretons venus d’outre Manche s’installent et donnent naissance à la Bretagne actuelle.

Cette dernière prend place dans les livres d’histoire lorsqu’un empereur, Louis Le Pieux, vient dans le centre Bretagne au début du ixe siècle après avoir mâté le roi Morvan. Probablement à Carhaix, il invite les dirigeants civils et religieux à se soumettre avant de nommer son représentant, un certain Nominoë, un noble du Poher qui deviendra plus tard roi de Bretagne. Ce Poher conservera une grande importance symbolique durant le Moyen Âge, particulièrement avec les ducs issus de la maison de Cornouaille. A l’époque moderne, le centre Bretagne alterne les périodes de prospérité (avec les toiles de lin) et de déclin. Il n’en demeure pas moins un pays de caractère, forgé par plusieurs millénaires d’une histoire à découvrir désormais au gré de sentiers dédiés au patrimoine archéologique.

 

Trésors archéologiques en centre Bretagne
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