Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Histoires de Bretagne

Un blog d'Erwan Chartier-Le Floch

Une villa galloromaine à Ploufragan

Publié le 9 Février 2009 par Erwan Chartier-Le Floch in Archéologie

 

 

Une nouvelle villa gallo-romaine vient d’être fouillée à Ploufragan, au sud de Saint-Brieuc, dans une zone où peu de vestiges de cette période avaient été mis au jour. Elle présente des caractères inhabituels au niveau architectural. Son étude confirme la densité du peuplement à l’époque gallo-romaine.

Depuis bientôt trois décennies, au gré des grands chantiers d’aménagement du territoire, l’archéologie préventive ne cesse d’apporter de nouvelles informations sur le passé de la Bretagne, notamment dans des zones où les recherches avaient été peu nombreuses jusqu’à présent. C’est le cas de la région de Saint-Brieuc, où le projet de rocade sud a permis de découvrir un site très important de l’âge du Fer, qui pourrait être fouillé prochainement, ainsi qu’une villa gallo-romaine, à Ploufragan, dont la fouille au printemps, vient compléter les informations recueillies lors de celles des villas de Taden et du Quiou, situées plus à l’est.

 

Une occupation continue

L’histoire du site de Ploufragan s’étale sur plusieurs siècles et remonte à l’âge du Fer. Les archéologues ont en effet découvert des fossés importants, datant de l’époque gauloise, qui laissent à penser qu’il existait ici une exploitation agricole dès cette période. Mais aucun bâtiment n’a été découvert dans le périmètre de fouilles. Une autre ferme lui a succédée à l’époque gallo-romaine, au début du Ier siècle de notre ère, au centre d’un terrain délimité par des fossés orientés vers les points cardinaux. La continuité entre site gaulois et gallo-romain est assez rare en Armorique. “Le site s’est ensuite agrandi, explique Romuald Ferrette, responsable de l’opération pour l’Inrap. Il devient une vraie villa. Plusieurs bâtiments ont été édifiés, des pavillons, qu’on a ensuite reliés entre eux par des galeries à portiques ou en couloirs. Ce plan est assez inhabituel par rapport aux villas fouillées en Armorique.”

Plus que des lieux de villégiature, les villas gallo-romaines étaient avant tout de grandes exploitations agricoles, fournissant des revenus à leurs propriétaires qui n’y séjournaient que peu de temps. Ceux-ci ne négligeaient toutefois pas le côté ostentatoire des bâtiments, notamment les parties privées où ils recevaient leurs relations et leurs clients. C’est le cas à Ploufragan. Les bâtiments s’organisaient autour d’une vaste cour, bordée par un bâtiment orienté est-ouest, long de soixante-cinq mètres. La cour s’ouvrait à l’est avec un porche. À l’intérieur, les archéologues ont mis au jour un vaste bâtiment, à l’ouest, probablement une partie de la pars urbana, la zone résidentielle. On y trouve notamment une salle d’apparat de neuf mètres su cinq, avec une forme en abside. “Jusqu’ici, on n’avait trouvé ce type de bâtiment que dans le sud-ouest de la France, c’est très inhabituel, note Romuald Ferrette. Ce genre d’architecture est caractéristique des IIIe et IVe siècles.”

Au nord-est du site, une troisième partie de la villa intrigue les archéologues. Les fondations des bâtiments y sont bien conservées, avec des parements reliés avec du mortier de la chaux. L’une des pièces est de forme circulaire et présente un diamètre de trois mètres. Elle est jouxtée par une salle à exèdre. Les archéologues s’interrogent sur la fonction de cette partie du site. “Peut-être s’agit-il d’un ensemble thermal inachevé, indique Romuald Ferrette. Il pourrait aussi s’agir de bâtiments destinés à une activité artisanale.” Cette villa était située à proximité d’une grande voie reliant Carhaix à Corseul. Localisée sur le territoire des Coriosolites, elle n’est pas très éloignée de celui des Osismes. Sa découverte et son étude viennent donc compléter la carte du peuplement de l’Armorique à l’époque romaine, un territoire beaucoup plus densément peuplé qu’on ne le pensait il y a encore quelques décennies.

Commenter cet article