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Histoires de Bretagne

Un blog d'Erwan Chartier-Le Floch

Les débuts du football en Bretagne

Publié le 15 Août 2011 par ECLF in Histoire de Bretagne

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 Le stade rennais en 1902.  

  

  

 

La Bretagne n’a jamais compté autant de clubs de football professionnels qu’aujourd’hui. Ils sont pour la plupart issus d’une histoire plus que centenaire et leur création raconte aussi les enjeux politiques et sociaux de l’époque.

Les jeux de balle sont très anciens et remontent à la plus haute antiquité, mais le football moderne tel que nous le connaissons aujourd’hui, remonte au XIXe siècle. Dans les années 1840, quelques publics schools anglaises, les établissements scolaires des classes aisées, adoptent les premiers règlements de jeux de balle. Puis, en 1863, des représentants de plusieurs clubs créent la Football Association afin de favoriser les rencontres et d’harmoniser les règlements en adoptant celui de Cambridge qui proscrit l’usage des mains. Le collège de Rugby refuse de les suivre et préfère conserver le jeu à la main. En 1871, une première coupe d’Angleterre est organisée. Le football se diffuse alors très vite dans toute la Grande-Bretagne, notamment après l’instauration du repos le samedi après-midi. Au début réservé aux élites, le sport se démocratise rapidement, particulièrement dans les milieux ouvriers.

 

Les Anglais de Saint-Servan

C’est grâce aux diasporas britanniques que le football part à la conquête du continent européen à la fin du XIXe siècle. Plusieurs clubs “anglais” sont créés comme Le Havre athlétique club ou l’Athlético Bilbao. C’est aussi le cas en Bretagne, sur la côte d’Émeraude, où réside une importante communauté britannique à Dinard. C’est donc sans doute dans cette région qu’ont évolué les premiers footballeurs dans les années 1880-1890. L’un des premiers clubs créés est d’ailleurs l’Union sportive servannaise – à Saint-Servan- où, jusqu’à la Première Guerre mondiale, la très grande majorité des jours sont britanniques. En 1902, seul un joueur était d’origine bretonne.

Le second milieu propice à la diffusion du football est celui des scolaires et des universitaires où se diffusent des modes hygiénistes. À l’époque, les collèges, lycées et universités sont réservés à une élite aristocratique et bourgeoise. Ces établissements sont également en contact avec leurs homologues britanniques. On doit donc à plusieurs professeurs et étudiants la création des premiers clubs bretons. Des équipes se forment ainsi aux lycées de Brest, de Vannes, de Quimper ou autour de l’université de Rennes. Un Stade rennais est lancé en 1902, puis un Stade rennais université club en 1904. Tous ces clubs bénéficient de la nouvelle loi sur les associations de 1901, qui va permettre de structurer de nombreux sports. À noter que la Loire-Atlantique reste à l’écart du mouvement. Elle est alors une terre de rugby : Nantes sera champion de France en 1917 et 1933 et ne se dotera d’un Football club de Nantes que dans les années 1940. Comme la plupart des industries bretonnes sont alors concentrées en Loire-Atlantique, le football peine jusqu’à la Première Guerre mondiale, à conquérir les milieux ouvriers.

 

 

 

 

 

 

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L'une des premières équipes de l'En-Avant de Guingamp.

  

  

  

Football et querelles religieuses

Le football breton s’est également développé sur un troisième terreau, celui des patronages catholiques et laïques. Ces organisations maillent le territoire breton, notamment les petites villes et les campagnes. Or, en ce début de XXe siècle, la situation religieuse est tendue après les lois de séparation de l’Église et de l’État. Par le biais des patronages, les catholiques et le clergé entend conserver son influence sur la jeunesse. Ils encouragent la diffusion de certains sports et particulièrement le football. Ce qui provoque une réaction des milieux républicains et laïques qui se dotent eux-mêmes de leurs organisations et de leurs équipes. Ce qui va avoir pour effet de multiplier les pratiquants et les supporteurs. Dans de nombreuses villes, on assiste donc à la création de plusieurs équipes suivant des clivages politico-religieux. À Guingamp, par exemple, les catholiques créent le Stade Charles de Blois évoluant en blanc et bleu, les couleurs de la ville mais aussi de la Vierge. Créé en 1912 par des instituteurs laïques, l’En-Avant de Guingamp évolue par contre en rouge et noir, des couleurs rattachées à la gauche. Jusqu’aux années 1970, les derbys entre les deux équipes seront souvent acharnés.

 

La Première Guerre mondiale

En sport comme dans bien des domaines, la Première Guerre mondiale marque une rupture. Dans un premier temps, elle brise l’essor de ce sport avec la mobilisation des joueurs et des dirigeants, dont nombre seront d’ailleurs tués dans les tranchées. Cependant, beaucoup de Bretons, notamment ruraux, vont apprendre à jouer au « football association » au contact des soldats britanniques ou d’autres régions. Le football devient l’une des rares occupations possibles lors des moments d’accalmie sur le front. Sa pratique se diffuse donc aussi dans les tranchées. À noter que le 4 juin 1916, le Stade rennais remporte la coupe des Alliés, l’ancêtre de la coupe de France, contre Lyon.

Dans les années 1920 et 1930, le football s’implante durablement en Bretagne, notamment dans les campagnes. Une centaine de clubs sont ainsi créés en Ille-et-Vilaine dans l’entre-deux-guerres. Issu de la fusion de plusieurs clubs locaux ou corporatistes, un Football club de Lorient est ainsi créé en 1926. La plupart des équipes évoluent dans des championnats régionaux. En fait, à cette époque, seul le Stade rennais joue un rôle de premier plan. Il est ainsi finaliste de la coupe de France en 1922 et 1935. Il est également le premier club breton à se professionnaliser dans les années 1930.

Le football breton connaît une nouvelle phase de développement après la Seconde Guerre mondiale. Le Stade rennais remporte sa première coupe de France en 1965, année où Nantes est sacré champion de France. Par la suite, d’autres clubs vont se hisser parmi l’élite – Brest accède en première division dans les années 1970, Lorient et Guingamp dans les années 1990 – contribuant ainsi à faire de la Bretagne une terre de football.

 

 

Pour en savoir plus :

Michel Lagrée, « la diffusion du football en Bretagne », Mémoires de la Société d’histoire et d’archéologie de Bretagne, 1994, pages 207-222.

Georges Cadiou, les Grands noms du football breton, Alan Suiton, Paris, 2006.

 

 

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