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Histoires de Bretagne

Un blog d'Erwan Chartier-Le Floch

Carnavals et jours gras en Bretagne

Publié le 4 Avril 2017 par ECLF in Histoire de Bretagne

Carnavals et jours gras en Bretagne

 

 

 

Un petit clin d’oeil (merci Christian Le Corre pour son extraordinaire iconographie), en avant goût des Clichés armoricains, à paraître en mai. Comme quoi, les Bretons du début du xxe siècle savaient aussi s’amuser ! Particulièrement à l’occasion des carnavals qui marquaient la fin de la saison froide. Ils étaient l’occasion de réjouissances parfois peu conventionnelles…

Il est difficile aujourd’hui d’imaginer la rigueur des carêmes d’autrefois, lorsqu’une bonne partie de la population mangeait maigre, voire jeûnait pendant quarante jours avant Pâques. Mais les jours précédant, dont le mercredi des cendres, étaient gras et le prétexte à faire bombance ou quelques excès.

 

Tueries du cochon et décapitation de coqs

C’était en général la période où l’on tuait le cochon dans les fermes, dont une partie était donc mangée les lundi et mardi gras, le voisinage étant appelé en renfort dans une ambaince fort conviviale. Dans le pays bigouden, on prépare encore de nos jours un plat spécial, réalisé avec de la tête de porc, le choten. Il est particulièrement délicieux, étalé sur le kouign dous, le pain doux, cuit spécialement à cette occasion.

Dans les petites villes de campagne, le mardi gras était l’occasion de pratiquer des jeux spécifiques, comme la décapitation du coq ou de l’oie. A cheval ou en charrette, les jeunes hommes n’avaient droit qu’à un seul coup pour couper la tête du volatile, préalablement tué. La tradition a perduré jusqu’à la fin du xxe siècle. A Guerlesquin est aussi organisé un curieux championnat du monde de bouloù-pok, un hybride moitié boule moitié palet, au cours duquel sudistes et nordistes s’affrontent.

 

 

 

Défilés, travestis et bonhommes carnavals

Dans les villes, particulièrement dans les ports, les jours gras sont une période de licence et de désordre, un court laps de temps où les rôles s’inversent, ou les conventions tombent où les esprits se libèrent pour marquer la fin de l’hiver. Malgré leurs réticences, les autorités civiles et religieuses laissent faire, même si elles reprouvent les débordements ou les moqueries dont elles vont être les victimes. L’une des premières mentions de carnaval remonte à 1732 et évoque un droit de « bazogues ou quoquinerie » à Pont-L’Abbé. Dans les années 1920, on interdit à Brest, le défile des Strouilles (du breton strouill, « boue ») au cours duquel les passants sont aspergés de gadoue ou du contenu des pots de chambre.

A partir de la fin du xixe siècle, on crée des cavalcades pour tenter d’organiser les carnavals, comme à Nantes ou à Scaër. Une partie de l’energie des participants est canalisée dans la création et à l’animation des chars. Mais le naturel comme les vieux rites reviennent vite au galop, notamment la fréquentation assidue des cafés de la ville.

Peu à peu, ces carnavals urbains débordent du mardi gras pour s’étaler sur plusieurs jours pendant lesquels on se déguise, on mange et on boit beaucoup. Le principe de l’invertion prévaut : les hommes s’habillent en femmes, les pauvres en riche, les marins en paysans… et inversement. Les défilés donnent lieu à des parodies de processions religieuses. Enfin, le mercredi des cendres a lieu le procès du bonhomme carnaval. A Douarnenez, on le nomme Den Paolig. Il s’agit souvent de la représentation d’une personnalité locale sur lequel on rend compte de tous les ragots de l’année. Puis, rituellement, le manequin qui sert de bouc émissaire pour tous les fléaux de l’époque, est exécuté rituellement, brûlé, pendu ou jeté à l’eau… Dans la cité penn-sardin, les Gras (meularjez en breton) sont toujours fort populaires et attirent des milliers de participants.

 

 

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