Née en 1911, à Glomel, Simone Le Moigne a été une sorte de Douanier Rousseau du centre Bretagne. Ses tableaux naïfs et attachants constituent un témoignage original sur la société rurale traditionnelle d’autrefois.
On peut dire que certaines vocations sont précoces, mais ne parviennent à s’exprimer que fort tardivement. Ainsi, si les velléités artistiques de Simone Le Moigne s’exprimèrent très tôt, elle ne devait réellement commencer à créer qu’à la soixantaine. A travers plusieurs centaines de toiles, elle aura, quoi qu’il en soit, livré un témoignage fort et émouvant sur un société rurale traditionnelle centre bretonne qui commençait à s’évaporer dans les années 1960.
Née à Trégornan
Simone Le Moigne naît un 3 juin 1911, à Magoar, près de Trégornan, l’un des trois villages de Glomel. Elle est la cadette, deux sœurs jumelles viendront après elle. « Mon père et ma mère formait un couple uni et catholique, explique-t-elle au magazine ArMen, en février 2001. Ils avaient été tous deux à l’école et parlaient français, mais préféraient la langue bretonne. » Comme le souligne le journaliste et chercheur, Fañch Broudic, elle parlait elle-même très bien cette langue dans laquelle il l'a interviewé à plusieurs reprises.
Son père, Jean-Louis, parle vannetais et porte le costume de Langonnet. Sa mère, Jeanne-Louise, est native de Rostrenen dont elle porte fièrement la coiffe. Simone Le Moigne se souvenait avec émotion de la grande coiffe vannetaise de sa grand-mère, Marie-Julienne Urvoy. Dans cette société, le costume revêtait en effet une importance considérable et restait un marqueur des différences sociales. Les modes vestimentaires ont bien évidemment influencé profondément l’œuvre de Simone Le Moigne.
A Paris
Simone Le Moigne se marie le 18 septembre 1935 avec Guillaume Le Bris. Il est sabotier. A l’époque, les noces bretonnes sont l’occasion de grandes réjouissances, réunissant plusieurs dizaines de personnes, qui lui inspireront plusieurs tableaux. Son mari est sabotier et le couple s’installe à Saint-Hubin, près de Rostrenen. Les sabotiers forment alors un groupe à part, vivant en bord de forêt, un peu à l’écart des villages. Simone Le Moigne apprend à creuser et décorer les sabots.
Mais le couple, qui vient d’avoir un enfant, vit chichement. En 1936, ils s’en vont, pendant deux ans, faire les betteraves et les moissons dans le bassin parisien. Puis, ils s’installent à Paris comme domestiques dans des maisons bourgeoises. En 1951, Guillaume est ainsi chauffeur de maître et Simone, cuisinière. Ils multiplient les expériences. Simone Le Moigne sert ainsi des diplomates, des politiques et des intellectuels. Un jour, elle a même René Cotty, le président de la République au téléphone.
L’entrée en peinture
Un jour, l’une de ses employeuses lui donne des crayons de couleurs. Depuis, elle a découvert des peintres comme Picasso. Dans les années 1960, elle commence à peindre et dessiner. Une passion dévorante. Elle revient alors en Bretagne, dans la région nantaise où elle fait des gâteaux qu’elle s’amuse à décorer. Elle repart à Paris où elle a le déclic. En 2001, elle confiait : « J’ai eu envie de revivre un temps heureux, ma jeunesse de 3 à 24 ans (…) Cela me faisait revivre les beaux paysages disparus, le bon temps passé dans la nature. »
En 1971, elle est définitivement de retour au pays. Elle s’établit à Saint-Herblain. L’année suivante, elle installe sa première exposition à l’espace Michel Columb, dans la cité des ducs de Bretagne. C’est un succès. Dès lors, Simone Le Moigne sera exposée dans d’innombrables galeries et dans de nombreux musées à travers l’hexagone et l’Europe. On retrouve ses œuvres de Lugano à Nice ou Paris.
Sa motivation est de retranscrire la réalité de la société rurale de sa jeunesse. En 1987, elle déclare ainsi à des écoliers : « voilà comment on vivait à la campagne en Bretagne quand j’avais votre âge. » Plutôt naïfs, ignorant la perspective, les tableaux de Simone Le Moigne regorgent en revanche de détails ethnographiques qui nous montrent comment les enfants du début du XXe siècle occupaient leur temps. Un temps d’insouciance qui rend ses toiles si attachantes.
Pour en savoir plus :
http://simone-le-moigne.com