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Histoires de Bretagne

Un blog d'Erwan Chartier-Le Floch

Yves-Marie Audrein, un évêque révolutionnaire

Publié le 7 Août 2019 par ECLF in Histoire de Bretagne

Yves-Marie Audrein, un évêque révolutionnaire

 

 

 

 

Originaire du centre Bretagne, Yves-Marie Audrein était un ecclésiastique sensible aux idées révolutionnaires. Prêtre jureur, élu à l’Assemblée législative puis à la Convention, il vote la mort du roi, mais avec sursis. Nommé évêque de Quimper, son assassinat, en 1800, fait grand bruit.

En ce 18 novembre au soir, Yves-Marie Audren, évêque constitutionnel du Finistère, monte dans la diligence qui part pour Brest. Il a emporté avec lui ses mitres, ses habits religieux et sa crosse. A minuit, sur la butte Saint-Hervé, à Kerfeunten, la voiture est brutalement arrêtée par une douzaine d’individus armés et qui en font sortir les occupants terrorisés. Audrein est reconnu et éloigné des autres voyageurs. On lui ordonne de mettre ses habits épiscopaux et un « tribunal » est improvisé. Accusé d’avoir trahi le roi et l’Eglise, il est fusillé devant les passagers abasourdis et son corps est jeté dans une fosse voisine. On ne lui a même pas accordé le temps d’une prière.

 

Originaire de Gouarec

L’assassinat de l’évêque de Quimper a, bien entendu, un retentissement énorme, l’homme restant particulièrement controversé. Yves-Marie Audrein était né à Gouarec, en centre Bretagne, le 14 octobre 1741. Devenu prêtre, il est d’abord nommé au collège de Quimper, puis directeur d’études au prestigieux lycée Louis Le Grand à une période ou Robespierre, Saint-Just ou Desmoulins y sont élèves.

Libéral, favorable aux idées nouvelles, il voit avec sympathie la révolution éclater. Il est partisan de la constitution civile du clergé qui provoque de graves tensions religieuses. Le serment imposé aux prêtres limite l’influence du pape sur l’église française, mais il est rejeté par une partie des catholiques.

En 1789, Audrein est nommé premier vicaire de l’évêque du Morbihan, département dont il est élu représentant à l’Assemblée législative en 1791, puis à la Convention. Il travaille notamment au comité pour l’Instruction publique et prône l’instauration d’une éducation laïque et nationale. Il participe aux grands débats politiques de l’époque. Après la fuite à Varennes, il vote ainsi la mort du roi, mais avec sursis.

 

Evêque constitutionnel du Finistère

Yves-Marie Audrein demeure un acteur de la vie politique française durant la Terreur, alors que les violences religieuses s’accroissent en Bretagne avec le début des guerres de chouannerie. De nombreux prêtres ont refusé le serment constitutionnel et sont rentrés dans la clandestinité. Ces « réfractaires » constituent les cadres d’une contre-révolution qui décline après l’échec du débarquement de Quiberon de 1795 et la fin de la Terreur.

En 1798, le Directoire nomme Yves-Marie Audrein évêque constitutionnel de Quimper, à charge pour lui de ramener un peu de sérénité dans le département, ce qui n’a rien d’aisé. D’autant qu’Audrein prononce l’éloge funèbre de Roberjot, un prêtre marié, ce qui choque les plus traditionnalistes.  Comme l’écrira par la suite l’historien Henri Sée : « c’était un esprit médiocre, mais un caractère élevé. Démocrate ardent et chrétien convaincu, il prétendait concilier ses aspirations politiques et ses convictions religieuses.

En fait, Audrein doit faire face à des oppositions de plus en plus vives. En 1800, au concile, il dénonce les excès de la Révolution, mais ces derniers lui reviennent comme un boomerang. Ses ennemis royalistes et chouans préparent une action contre lui. Tout à fait préméditée – il n’a pas été assassiné par des bandits de grand chemin comme on a pu le dire –, elle a lieu dans la nuit du 19 novembre 1801. Délicate, l’enquête judiciaire mettra plusieurs mois à aboutir. Le chef des tueurs, Charles Lecat, dit « la Volonté » est un ancien chouan, en liaison avec des émigrés en Grande-Bretagne. Arrêté, il s’évade, puis est repris et guillotiné en 1801. Le dernier membre de la bande n’est arrêté qu’en 1806.

 

 

A visiter :  Goarec, carrefour commercial

Située sur une boucle du Blavet, Goarec n’a pas conservé de souvenirs marquants de l’évêque Audrein, mais cette petite cité centre bretonne vaut assurément le détour. Fondée par les Rohan qui y aurait construit un château, son centre conserve plusieurs habitations médiévales, dont le pavillon des Rohan où la justice seigneuriale était rendue. Située en haute Cornouaille, Goarec dépendait de l’évêché de Quimper jusqu’à la révolution. Elle a longtemps été un carrefour commercial, en témoignent ses belles halles du XVIIIe siècle, propriété des Rohan à l’origine, avant d’être acquises par la commune en 1851. Les foires régulières étaient le prétexte à quelques débordements, en témoigne cette déclaration du préfet des Côtes du Nord en 1837 : « Ces foires sont en trop grand nombre. Il en résulte un déplacement trop souvent répété des habitants des communes voisines qui pour la plupart n'ont rien à y faire et qui ne s'y rendent que pour boire dans les cabarets. Il serait bien qu'elles fussent réduites : on y ferait les mêmes affaires et il y aurait un bénéfice réel pour l'agriculture »…

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