Les panneaux volés à Solesmes seraient sur le Mené Bré
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Un mystérieux correspondant anonyme nous a assuré que les panneaux routiers volés à Solesmes et Sablé-sur-Sarthe, des communes liées au premier ministre François Fillon, à la fin de l’année 2010 et au printemps 2011, se trouvent au sommet du Mené Bré, dans le Trégor. Ils avaient été dérobés par Stourm ar Brezhoneg, une organisation clandestine qui milite pour la langue bretonne et qui aurait également effectué une action contre France 3 à Saint-Brieuc, la semaine dernière.
Sous couvert d’anonymat, lundi 13 juin au soir, un correspondant anonyme nous a assuré que les panneaux routiers volés à Solesmes et Sablé-Sur-Sarthe, par Stourm ar Brezhoneg, avaient été déposés au sommet du Mené Bré, dans le Trégor. Il a également indiqué que Stourm ar Brezhoneg revendiquait une action contre les locaux de France 3 Bretagne, à Saint-Brieuc, la semaine dernière, « afin qu’il y ait du breton tous les jours à la télé ».
Selon nos informations, lors du concert du groupe les Ramoneurs de Menhirs, à la fête nationale de la langue bretonne de Cavan, samedi 11 juin, des individus aux visages dissimulés, auraient montré ces panneaux au public.
Dans le communiqué revendiquant le vol des panneaux au début de l’année, Stourm ar Brezhoneg indiquait qu’ils seraient restitués lorsque le gouvernement de François Fillon « aurait tenu parole » en faisant voter une loi sur les langues régionales. Les déclarations en ce sens de Frédéric Mitterrand, en visite en Bretagne vendredi, expliquent peut-être cette restitution.
Un buzz médiatique
Dans la nuit du 29 au 30 décembre, des militants bretons avaient donc démonté et emporté les panneaux de l’entrée de la commune de Solesmes, dans la Sarthe, dont l’actuel premier ministre François Fillon a été le maire et dont il demeure élu au conseil municipal. L’action avait été revendiquée par Stourm ar Brezhoneg dans une longue lettre adressée à différents médias. Le communiqué stipulait : « Stourm ar brezhoneg insiste sur le fait que les panneaux de Solesmes n’ont pas été volés : ils seront restitués dès que le gouvernement de François Fillon aura tenu parole. » L’organisation écrivait également : « Nous pouvons comprendre la colère de François Fillon, des élus et habitants de Solesmes suite à notre action. Nous leur demandons donc de songer à notre propre colère lorsque, tous les jours, nous constatons si souvent l’absence de notre langue sur les panneaux de nos villes et de nos routes… Lorsque nous constatons que la place du breton reste ridicule dans les médias… Lorsqu’il nous est interdit d’utiliser notre langue dans tous les aspects de la vie publique… Lorsque l’État continue de freiner l’ouverture et le développement de classes et d’écoles dans notre langue. » Stourm ar Brezhoneg évoquait la récente inscription des langues régionales dans la constitution et les récents projets de loi en faveur de ces langues : « Avoir ajouté en 2008 que “les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France” dans la constitution ne nous est d’aucune utilité : ces langues continuent de mourir à petit feu. Nous demandons donc que le président et son gouvernement tiennent leur promesse : nous voulons que cette proposition de loi soit inscrite et votée dans les plus brefs délais. »
Cette action de Stourm ar Brezhoneg a eu un retentissement important, du fait notamment de la réaction très vive du maire de Solesmes qui a parlé de « vol d’identité ». François Fillon n’a pas réagi officiellement mais, selon plusieurs sources, son cabinet avait contacté directement le parquet. Le procureur de Quimper avait envoyé des gendarmes afin de saisir la lettre de revendication dans les locaux de la rédaction de France Bleu Breiz Izel, à Quimper. Les journalistes présents ont dû se soumettre à un relevé de leurs empreintes digitales. Autant d’éléments qui ont donné une audience médiatique inattendue à cette action.
Barbouillage de panneaux
La revendication avait d’autant plus étonné que Stourm ar Brezhoneg semblait en sommeil depuis de nombreuses années. Cette organisation est apparue en 1983, lors d’une manifestation à Guingamp lors de laquelle de nombreux panneaux avaient été barbouillés. Pendant les années 1980, les militants de Stourm ar Brezhoneg se sont distingués par de nombreux barbouillages de panneaux routiers afin d’exiger une signalisation bilingue. Douze procès ont eu lieu et dix-neuf militants ont été condamnés à cette période, écopant d’amendes ou de peine de prison avec sursis. Les militants de Stourm ar Brezhoneg se sont inspirés du mouvement gallois, Cymdeithas yr Iaith Gymraeg (la société de la langue galloise), très actif dans les années 1970.
Même si la méthode de Stourm ar Brezhoneg a pu heurter, elle s’est révélée efficace, les collectivités territoriales choisissent d’adopter progressivement une signalétique bilingue plutôt que de continuer à payer pour le nettoyage des panneaux dégradés. Les Côtes d’Armor ont été le premier département de basse Bretagne à installer des panneaux en français et en breton, suivi par le Finistère puis, dans les années 1990, par le Morbihan. Aujourd’hui, ces panneaux routiers bilingues font partie du paysage breton. Ils sont même appréciés des touristes qui visitent la péninsule. Depuis quelques années, la signalétique bilingue s’est développée grâce à l’action de l’office de la langue bretonne. Cette présence publique de la langue bretonne semble d’ailleurs faire l’unanimité dans la classe politique, à l’exception du Front national, dont l’une des dirigeantes, Marine Le Pen, avait dénoncé, en 2009, l’existence de ces panneaux en breton.
Stourm ar Brezhoneg avait revendiqué quelques barbouillages au début des années 2000. Après Solesmes, d’autres panneaux avaient été dérobés dans la Sarthe et en Vendée au printemps 2011. Le retour médiatique en 2010 semble donc se confirmer. Il semble cependant correspondre à un regain d’activisme dans la tendance bretonne et l’arrivée d’une nouvelle génération de militants, notamment depuis les manifestations contre le CPE en 2005. Les actions symboliques se sont ainsi multipliées, notamment en Loire-Atlantique, dont les militants bretons réclament le retour dans la région Bretagne et manifesteront pour cela le 18 juin prochain.