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Histoires de Bretagne

Un blog d'Erwan Chartier-Le Floch

De Gaulle et la Bretagne

Publié le 18 Juin 2012 par ECLF in Histoire de Bretagne

 

 

 

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Fondateur de la Cinquième république, le général de Gaulle a entretenu un rapport complexe avec la Bretagne. Une relation mutuelle faite de coups de cœur, de moments forts comme de forte contestation.


Le premier rapport du général de Gaulle avec la Bretagne, c'est incontestablement celui noué par son oncle, prénommé Charles comme lui. Né en 1837, ce premier Charles de Gaulle se prend d'une folle passion pour la Bretagne et les pays celtiques alors qu'il est étudiant en lettres. Il entretient une abondante correspondance avec plusieurs écrivains bretons de l'époque, dont l'un des plus fameux, Théodore Hersart de la Villemarqué, l'auteur du Barzaz Breiz. Charles de Gaulle sera d'ailleurs le secrétaire et l'un des rares membres actifs de la Breuriez Breiz (fraternité de Bretagne), imaginée par La Villemarqué sur le modèle des académies druidiques du pays de Galles. Frappé de paralysie et résidant à Paris, Charles de Gaulle apprend le breton, écrit des poésies et lance un vibrant Appel aux représentants de la race celtique, en 1864. Dans ces années-là, il participe également à un projet de colonie bretonne et galloise, en Patagonie, qui échouera. L'anecdote veut que son célèbre neveu, en voyage officiel en Argentine, dans les années 1960, se soit vu remis en cadeau une lettre relative à ce projet. Le général, au patriotisme français sourcilleux, aurait, paraît-il peut apprécié ce document vantant les mérites de l'établissement d'un « foyer national breton » outre-Atlantique.

 

La tourmente de 1940

En 1921, devenu officier, Charles de Gaulle se marie à Yvonne Vendroux qui avait passé plusieurs séjours de vacances en Bretagne et en avait gardé un excellent souvenir. Ce qui explique sans doute que le couple choisisse Bénodet comme lieu de villégiature, en 1933. Quelques années plus tard, alors que débute la Seconde Guerre mondiale, la Bretagne va jouer un rôle important dans la geste gaullienne. Un rôle intime d'abord puisque c'est par Brest que partent sa femme et ses proches, en juin 1940, pour venir le rejoindre à Londres. C'est à Paimpont que décède la mère du général, le 16 juillet 1940, moins d'un mois après son célèbre appel du 18 juin.

Un appel particulièrement entendu sur l'île de Sein. A la fin juin, la plupart des navires et des hommes valides voguent vers la Grande-Bretagne. La forte présence des Sénans dans les premiers contingents de la France Libre fera dire à de Gaulle que l'île de Sein, c'est le quart de la France. Particulièrement nombreux dans les forces françaises libres, les Bretons joueront un grand rôle dans l'entourage du général rebelle. Ils constitueront d'ailleurs une amicale, Sao Breiz (« debout Bretagne »), active pendant toute la guerre.

 

Retour triomphal

La Bretagne est bien debout, en ce mois d'août 1944, lorsque le général de Gaulle fait une entrée triomphale dans Rennes. Le 21 août, devant vingt mille personnes, il déclare au balcon de l'hôtel de ville « quelle émotion est la notre de nous trouver rassemblés dans Rennes libérée, dans la Bretagne victorieuse où les guerriers allemands qui ont souillé son sol sont en train de disparaître comme morts ou comme prisonniers. » Un an plus tard, il effectue un nouveau périple dans la péninsule, qui le mènera de Saint-Brieuc, à Guingamp, Morlaix, Brest, Douarnenez, Quimper, Lorient, Vannes, Saint-Nazaire...

Retiré des affaires en 1946, le général visite régulièrement la Bretagne lors de voyages commémoratifs qui sont autant d'occasions pour lui d'alimenter sa popularité. Le 29 août 1946, il visite Sein. En juillet 1947, il fait le tour des anciens maquis. Ces voyages sont éminemment politiques pour celui qui a lancé le Rassemblement du peuple français (RPF). Ainsi, le 27 juillet 1947, à Rennes, le général de Gaulle s'en prend très violemment aux communistes, accusés d'être à la solde de Moscou.

 

L'homme de la Cinquième république

Malgré ses attentes et son ambition, il faudra encore de nombreuses années – et les circonstances particulièrement dramatiques de la guerre d'Algérie – pour que Charles de Gaulle ne revienne aux affaires, en mai 1958. Quelques mois plus tôt, en octobre 1957, il avait effectué un voyage en Bretagne, notamment dans les monts d'Arrée, qui l'avait particulièrement inspiré. Plus tard, lorsqu'il sera très contesté, notamment pendant la crise algérienne en 1960, de Gaulle effectuera plusieurs voyages bretons, notamment à Sein, en 1960, dont les images lui servent à assoir une légitimité fondée sur le souvenir de la résistance.

En prenant le pouvoir, les gaullistes entendent remettre de l'ordre dans un pays très divisé par la décolonisation. Ils instaurent un nouveau régime, la Cinquième république, autoritaire et très centralisé. En Bretagne, les gaullistes sont combattus par la gauche, mais également par le centre démocrate-chrétien, très implanté dans la péninsule et opposé au pouvoir très personnel du général. Les années 1960 sont également marquées par une forte demande de régionalisation auquel le pouvoir tente de répondre par des décentralisations industrielles. Le général de Gaulle viendra ainsi inaugurer plusieurs grands travaux, censés assurer le développement économique de la région. Il visite ainsi le barrage sur la Rance, le CNET de Lannion... Il est présent au lancement du paquebot France...

La Bretagne des années 1960 se transforme. A un incontestable développement économique s'oppose une opposition de plus en plus marquée au régime, notamment dans la jeunesse. Mai 68 passe en Bretagne comme ailleurs. De Gaulle réserve à Quimper son dernier discours, en 1969, avant de démissionner et de partir pour un dernier voyage, dans un autre pays celte, l'Irlande.

 

Le discours de Quimper

En novembre 1968 est annoncé la venue du général de Gaulle en Bretagne. La nouvelle intervient dans un climat de contestation très particulier, marqué par les évènements de mai 68 et l'agitation entretenue par l'extrême-gauche. En Bretagne, l'actualité est aussi ponctuée par les attentats du Front de libération de la Bretagne (FLB), notamment celui qui a détruit une partie de la caserne de la CRS 13 à Saint-Brieuc. L'agitation du monde paysan est aussi récurrente. Lorsqu'il arrive à Rennes, le 31 janvier, l'accueil fait au général de Gaulle est plus que mitigé. Des sifflets et des huées se font entendre pendant son discours. La visite des installations militaires de Brest et Landivisiau, le 1er février, est plus tranquille.

Le point d'orgue du voyage doit avoir lieu le 2 février, à Quimper. Pour éviter trop de contestation, la police a fait le ménage : syndicalistes, militants d'extrême-gauche, autonomistes sont envoyés en bus, dans la campagne, à une vingtaine de kilomètres. Ils ne peuvent revenir que par leurs propres moyens. C'est donc devant plusieurs milliers de personnes et un auditoire plutôt acquis, que le général de Gaulle prononce ce qui sera son dernier grand discours officiel. Il annonce un référendum sur la régionalisation et la réforme du Sénat et marque sa volonté de commencer à décentraliser la France. Devant un public quelque peu interloqué, il prononce aussi quelques phrases dans un breton à la prononciation plutôt inhabituelle. Il s'agit de vers composé par son oncle, Charles de Gaulle.

En avril 1969, le non l'emporte à 52 % en France, mais en Bretagne, le oui avait été majoritaire. Désavoué, le général de Gaulle démissionne, mettant ainsi fin à une carrière politique hors normes.

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H
Salut,<br /> <br /> Il y a pas mal de livres et même de bandes dessinées sur l'histoire de la Bretagne, je ne sais pas si vous l'avez déjà vu mais l'illustrateur breton des éditions Yoran embaner vient de lancer une<br /> série d'illustrations sur l'histoire de Bretagne, depuis l'an 0 jusqu'à notre ère.<br /> <br /> Les premières illustrations (et l'interview de l'illustrateur breton) sont disponbile ici : http://www.culture-bretagne.net/histoire-bretagne-peu-connue-jeunes-marc-mosnier/<br /> <br /> Kenavo !
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