Etonnant Morvan Lebesque ! Et, finalement, si peu connu. En France en général, il doit sa renommée à ses articles au Canard Enchaîné et constitue une référence pour ce qui concerne l’œuvre d’Albert Camus. En Bretagne, plus précisément, il reste l’auteur de Comment peut-on être breton ? Essai sur la démocratie française, ouvrage qui a eu – et continue – d’avoir un fort retentissement sur ce qu’on nomme le mouvement breton. Si certaines facettes de l’homme sont donc connues, d’autres le sont moins, même si son engagement au Parti autonomiste breton, à la fin des années 1920 puis sa très limitée contribution à l’Heure bretonne, à la fin de l’année 1940, sont de notoriété publique. Reste que bien des épisodes de sa vie restent cachés, même pour ses proches. Ce Nantais devenu intellectuel parisien, n’a jamais dédaigné brouiller les pistes. Comme si, en fin connaisseur de Shakespeare et en passionné de théâtre, il avait fait sienne la formule du Britannique : « The World is a stage and we are all merely players / Le monde est une scène et nous sommes tous de formidables acteurs. » Or, à côté d’une existence riche en rebondissements, reste une œuvre importante, constituée d’un roman, d’une dizaine d’ouvrages, de quatre pièces de théâtre et, surtout, de près de huit cents chroniques au Canard Enchaîné, un vaste corpus qui permet de se faire une idée assez complète de ce penseur, humaniste, libertaire, démocrate et – fondamentalement – breton..
Pourtant, Lebesque demeure méconnu. Il est même parfois calomnié. Parmi les principaux reproches récents émis à son encontre, figure celui de ne pas avoir été un réel homme de gauche, mais, au contraire, un nationaliste réactionnaire qui aurait habilement profité de son statut de chroniqueur du Canard enchaîné pour se refaire une virginité progressiste. On nous ressert certains épisodes de jeunesse – il est vrai peu glorieux – pour discréditer facilement un homme au destin complexe. Un raisonnement dérangeant, tant il nie la possibilité pour un homme d’évoluer dans ses convictions, d’accepter lucidement ses erreurs pour s’engager dans des combats qu’il juge plus dignes. Dans un siècle aussi complexe que le Xxe, dans des époques où tant de penseurs se sont fourvoyés dans des idéologies totalitaires, le bilan de la vie et de l’œuvre de Morvan Lebesque ne sont sans doute pas les plus négatifs. Sans revenir ici trop en détail sur les engagements militants, notamment bretons, de Lebesque, qu’en est-il de ses convictions sur la question sociale et sur son rapport à la gauche.
Comment peut-on classer Lebesque ?
Force est d’abord de constater que la réponse n’est guère à chercher dans son appartenance à des structures militantes. Le jeune Morvan Lebesque a été membre du Parti autonomiste breton (PAB) de 1928 à 1930, hésitant entre la fraction la plus nationaliste, incarnée par Debeauvais qu’il côtoyait à Rennes et la tendance fédéraliste, plus progressiste, dont il était proche intellectuellement. Il quitte d’ailleurs le parti non pour des raisons idéologiques mais après en avoir dérobé la caisse… Puis, en 1931, il s’engage quelques mois au groupuscule fascisant Evit Keltia, groupuscule d’une dizaine de personnes devenu ensuite le parti national intégral breton (PNIB). Passées ces deux expériences, Lebesque n’a plus jamais appartenu à un mouvement politique, même si, bien plus tard, à la fin des années 1960, il a été très proche de la jeune Union démocratique bretonne (UDB) au journal de laquelle, Le peuple breton, il a offert quelques chroniques.
Devenu, au début des années 1950, un journaliste en vue dans la place parisienne, grâce à ses chroniques au Canard enchaîné, il ne semble pas avoir souscrit des engagements partisans. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir des opinions, dénonçant à travers des textes d’une rare force les injustices de son temps. Ce qui lui vaudra cet hommage de Roger Fressoz, chef de rédaction de l’hebdomadaire satirique : « pendant dix-huit ans, il fut de toutes les grandes querelles, de toutes les batailles pour les grandes causes du moment : contre la guerre et la torture en Indochine, en Algérie, contre l’autoritarisme et l’égolatrie gaulliste, contre le stalinisme et les séquelles, pour les idéaux de Mai 68 ; et puis, en permanence, contre l’ordre répressif, l’Etat-Moloch, les institutions avariées, l’église châtreuse et réductrice, l’Armée abrutissante, l’argent roi et la corruption reine. »
Révolté Lebesque ? Assurément. Mais dans quel camp ? Lebesque n’est pas communiste. Certaines de ses premières chroniques du Canard laissent parfois présager d’une certaine proximité, comme en mai 1956, avec un texte « Vive Robespierre » qui rappelle certaines analyses de Marx dans son Coup d’Etat du 18 Brumaire. Un Marx que Lebesque a sans doute lu et… digéré, ce qui lui permet de garder une distance critique avec le marxisme. Une idéologie qu’il estime en tout cas dévoyée par ses zélateurs. Cette même année 1956, Lebesque prend fait et cause pour les insurgés hongrois. Puis, dans plusieurs textes, il dénonce vivement le totalitarisme des « démocraties populaires ». Il reproche surtout au communisme d’avoir remplacé une oppression par une autre : « Tuez le bourgeois, il ressuscite : la bourgeoisie est aussi un état d’âme. Telle est l’affligeante vérité que croissent les corbeaux de Moscou au-dessus des beaux bureaucrates empelissés dont la Ziss, au passage, éclabousse la camarade éboueuse. » Lebesque est encore moins attiré par la gauche française traditionnelle et notamment cette vielle SFIO qu’il juge si jacobine. Une gauche gouvernementale, enfermée dans ses compromissions et incapable de bousculer un appareil d’Etat qui, selon lui, a confisqué le pouvoir. Une première gauche qu’il estime surtout trop éloignée du peuple.
Où situer Lebesque alors ? Si on doit le rattacher à un courant de pensée, si hétérogène soit-il, c’est assurément à la gauche libertaire qu’il évoque à de nombreuses reprises et dont Mai 68 lui semblera une des incarnations. Et s’il écrit ne guère apprécier le terme « vieil anarchiste » qu’il estime à juste titre galvaudé, Morvan Lebesque peut, à maints égards, en être qualifié. Il s’enflamme ainsi, à la mort d’Einstein en 1954 : « L’anarchisme est cartésien, l’anarchisme est constructeur. Son code moral, à l’opposé du code du dictateur ou de l’esclave, proclame éternellement la volonté de création contre la volonté de soumission ou la volonté de puissance. »
Parmi les penseurs qui ont influencé Lebesque, on trouve Georges Sorel, le père de l’anarcho-syndicalisme, avec qui il partage une certaine empathie pour la violence politique, le chaos révolutionnaire qui débouchent sur des périodes créatrices. En 1955, les émeutes ouvrières de sa ville natale, Nantes, lui inspirent ce texte dans le Canard Enchaîné : « Qu’appelez-vous donc VIOLENCE ?, sinon que dans un pays comme le nôtre, en 1955, un homme gagne 1500 francs par quinzaine quand il faut mathématiquement le double pour vivre un peu décemment, pour avoir un peu conscience de sa propre vie. Qu’appelez-vous donc violence, sinon que la grande presse qui ne nous cache rien des caprices des milliardaires ou des amours de princesses, oublie cet homme au point de ne jamais parler de lui, sauf pour le dénoncer lorsqu’il proteste ? Qu’appelez-vous violence, sinon le fait que la protestation de cet homme est automatiquement étouffée, taxée d’exagération et d’incivisme, promise à la résignation après un baroud d’honneur dans la rue ? Et, enfin, qu’appelez-vous donc violence sinon les maux dont on fustige cet homme et ce terme, entre autres, qui revient de plus en plus dans les déclarations, les éditoriaux de presse, les consignes de police : l’ENNEMI DE L’INTERIEUR ? »
Parmi les influences de Lebesque, on trouve bien sûr Proudhon, dont il partage notamment les idées fédéralistes et la critique des structures autoritaires et étatiques.
Philosophie de la misère
Il est vrai qu’avec Proudhon, et au contraire de nombre de penseurs estampillés « de gauche », Lebesque possède la caractéristique d’être un authentique fils du peuple. Il est d’abord issu d’un milieu très modeste. Son père est marchand ambulant, sa mère « une enfant de l’Assistance. Elle sortit de l’orphelinat à seize ans, sans métier et sachant à peine lire mais propre à devenir ce que les religieuses appelaient « une fille en condition » ». Boursier, il ne doit qu’à ses aptitudes intellectuelles de suivre un cursus au prestigieux lycée Clemenceau de Nantes. Les préjugés de classe le révoltent déjà. « A cette époque, se souvient-il dans Comment peut-on être breton ?, la bourgeoisie provinciale tolérait assez mal l’accession des pauvres aux études : de certains pauvres du moins, ceux qui l’étaient un peu trop ou sans grâce. Cette répugnance provoqua un incident qui de nos jours paraîtra, je l’espère, incroyable. Un soir, notre professeur de latin, M. P…, me demanda de rester après la classe et, toutes portes closes, me tint un petit discours pour m’exhorter à quitter le lycée. « Mon cher enfant, me dit-il, vous voyez bien que vous n’êtes pas ici à votre place. Qu’attendez-vous, que vos petits camarades vous fassent un affront ? Que diable, il n’y a pas de honte à être ouvrier ! ». »
La misère, comme Proudhon, Lebesque l’a connue. Jeune militant du PAB, Olier Mordrel se souvient de lui, comme « un militant famélique, couchant sur un banc quand il lui manquait dix francs pour un lit. »En 1932, arrivé à Paris en pleine crise économique, Morvan Lebesque a vécu en clochard. Une expérience qu’il décrit dans un petit opuscule oublié De l’humour au Canard Enchaîné, paru en 1954 : « Etre pauvre, dans un monde aussi aisément riche que le nôtre, c’est être un fantôme au milieu des vivants. A une certaine heure de ta vie, tu es mort. Quand ? A l’heure où le patron de ton hôtel t’a mis à la porte, par exemple ; ou bien à l’heure où ta petite amie t’a quitté ; ou bien à l’heure encore quand tu as cessé d’avoir faim – je dis bien : quand tu as cessé d’avoir faim, quand la faim a cessé d’être cette louve qui te dévore pour devenir du vide dans ton corps, le vide où s’en vont ton souffle et ta vie. Donc tu es mort et te voilà fantôme ; et c’est désormais sous l’apparence d’un fantôme que tu vas te promener dans les rues. »
Les années qui suivent ne sont guères brillantes. Embauché comme magasinier à la Samaritaine, il connaît la vie abrutissante des petits employés et la tyrannie des petits chefs, situation qu’il évoquera dans une de ses pièces de théâtre, Les fiancés de la Seine. Impossible que ces expériences, ces « galères » n’aient pas influencé le futur chroniqueur du Canard enchaîné. Elles inspireront nombre de ses révoltes et de ses chroniques. Elles permettent sans doute de mieux comprendre l’humanité qui se dégage de nombre de ses chroniques du Canard Enchaîné, sa proximité avec les laborieux et les exclus et explique sa popularité, justement, auprès des petites gens dont il savait si bien exprimer l’absurde de leur condition.
Des expériences dont Morvan Lebesque a su aussi tirer leçon lorsqu’il estime s’être fourvoyé. A plusieurs reprises, il fera ainsi son autocritique sur la question du racisme. Toujours dans le Canard Enchaîné, au fil d’un texte appelé « dialogue sur le racisme », il répond à un interlocuteur qui lui demande si son antiracisme est un acte de foi : « Non : c’est une expérience personnelle. A certaines époques de ma vie, quand je faisais ce que j’appelle mes apprentissages, il m’est arrivé, à moi aussi, de dénigrer la race d’un autre homme. Cet homme, par exemple, m’avait fait du tort, ou je le croyais. Instinctivement, je m’en prenais à son groupe. Cela me rassurait, me donnait une explication, comprenez-vous ? Et puis, plus tard, je revécus en pensée ces moments-là. Et je constatais ceci : tous, sans exception, correspondait de ma part à une réaction de désarroi, de faiblesse ou de sottise. Ergo, par moi-même et nul autre, il sied à une expérience, j’en conclue que le racisme est une défaillance de l’esprit. A présent, j’en suis corrigé, et il me plaît de voir que le monde s’en corrige, lui aussi, peu à peu. Je ne prétends pas être meilleur que mon siècle. »
Un épisode va particulièrement lui permettre d’exprimer ses convictions progressistes et ses idées libertaires, la révolte étudiante de Mai 68. Evènement d’autant plus intéressant d’autant qu’il permet de créer des ponts avec un combat pour la Bretagne qu’il vient de retrouver. D’ailleurs, selon l’historien du Canard Enchaîné, Laurent Martin : « Morvan Lebesque est celui, qui, au Canard, semble avoir été le plus en phase avec le mouvement de Mai, croyant y retrouver l’essentiel de son humanisme héroïque. Ses articles décrivent deux France, ou plutôt deux camps totalement opposés : d’un côté un Etat autoritaire, coupé du pays, fonctionnant en vase clos, plus que jamais adepte de la fausse grandeur et du vain prestige, de l’autre une population avide de changement, de débat, de démocratie. Ce sont même « deux constantes de l’histoire, deux logiques politiques, deux philosophies » qui s’affrontent des deux côtés des barricades. »
Pour Lebesque, Mai 68, c’est avant tout le retour de la politique et de l’histoire. Il prend parti pour Cohn-Bendit contre l’Humanité et soutient les étudiants dans une chronique « La révolte », publiée le 8 mai, les encourageant à se révolter contre l’avenir que la République gaulliste leur réserve. « Mais non, on lui promet bien pis, à la jeunesse. Quelque chose qui n’a pas de nom, qui en aura peut-être vers la fin de ce siècle : un monde enfin aseptisé de la « politique », où les bourgeoisies de droite et de gauche auront fini par se reconnaître et se rejoindre ; un système parfaitement rodé où les pauvres et les asservis ne seront pas « dans la ligne » et n’auront plus qu’à crever en silence, évacués, comme aujourd’hui les poètes russes, les Kurdes et les Biafrais ; une France où les Pompidou régneront sur soixante-dix millions de machines à laver, sans la moindre contestation (la motion de censure, déjà, c’est du temps perdu, ça gêne l’Etat et les affaires), toute politique réduite à la fiche crachée ponctuellement par la machine à sondages : « Etes-vous satisfait du gouvernement ? Réponse : oui 80 %. Pas de nom, ai-je dis ? Si, le fascisme. »
Lebesque ne plaçait-il pas trop d’espoir dans cette révolte ? Dans un article de La nation bretonne d’août 1970, l’écrivain Alain Guel, qui l’avait bien connu, notait : « Nous étions passés par la même école, celle de la France et des évènements qui nous avaient appris d’une façon négative, ce qu’un honnête homme, aujourd’hui, doit se garder d’approuver : que la France est une nation conservatrice et stérilisante ; que nous ne pouvions pas compter sur elle pour quoi que se soit, pas même la sienne, comme nous devions l’éprouver à la fin de Mai. » Pourtant, dans Comment peut-on être Breton ? Lebesque estimait : « Mai avait réintégré l’autonomisme dans l’histoire. L’évidence révolutionnaire éclatait enfin contre le jacobinisme devenu avec le temps une idéologie de droite ; contre l’Etat napoléonien, son héritier, on revenait à Proudhon, à Bakounine, au principe des pouvoirs de base. »
Bretagne : peuple prolétaire, peuple de prolétaires
Car désormais, Lebesque était persuadé qu’il fallait lier combat breton et lutte de gauche. « C’est en tant que Bretons, écrit-il dans Le Peuple breton de mars 1968, qu’avec nos frères progressistes de France et du monde nous affronterons les grands problèmes de notre époque, le socialisme, la culture pour tous, la paix. Et notre contribution originale à ces problèmes signifiera notre ethnie autant que l’appartenance à un sol. » Et, déjà, il exprimait ses doutes quant aux capacités de la gauche française à réformer un régime, la Ve république, qu’il jugeait profondément autoritaire, centralisateur et antidémocratique. « Le socialisme niveleur tel qu’on le pratique, ou plutôt qu’on le parle en France, ne peut conduire qu’à sa dérision : le retour aux systèmes droitiers. C’est un socialisme de Chefs et non de responsables. Il instaure le culte de la personnalité, secrète tôt ou tard une nouvelle bourgeoisie – bourgeoisie de la fonction, aussi redoutable que celle de l’Argent – et aboutit fatalement au militaire. Nier l’identité d’un peuple, c’est nier les pouvoirs de base et, à plus ou moins brève échéance, l’identité même des individus », écrit-il dans La nation bretonne du 16 avril 1970.
Lebesque s’affichait de gauche et jugeait que l’apolitisme du mouvement traditionnel breton n’aboutissait qu’à une impasse. Dans « Un certain angélisme », paru dans le Peuple breton, il constatait, ironique : « Car se proclamer ni rouge ni blanc en Bretagne, c’est faire doublement métier de dupe, c’est en remettre sur les niais de l’hexagone qui prétendent : « Moi, monsieur, je he ne fais pas de politique ! ». pure hypocrisie d’ailleurs : il n’est plus à démontrer que quiconque « ne fait pas de politique » fait en réalité une politique de droite […] Na ruz na gwenn ? Hélas si, voyez comme cela se trouve : il est gwenn, notoirement gwenn, archi-gwenn, conservateur et clérical. »
Luttes sociales et luttes bretonnes pouvaient se rejoindre dans une même critique d’un Etat centralisateur, agissant en fait comme un aménageur du capitalisme le plus dur. En nivelant les différences, en niant toute diversité humaine, la République française ne faisait, selon lui, que préparer à la généralisation de « l’american way of life », une uniformisation mondiale des goûts, des modes de consommation et des façons de pensée, belle anticipation d’une certaine mondialisation tant décriée aujourd’hui. Dans « A bas la caserne », dans le Peuple breton de décembre 1968, Lebesque écrit ainsi : « Ce qu’on appelle l’économie française et qui est en réalité une intendance de caserne, une subsistance comme on dit à l’armée : fermée sur elle-même, fonctionnant en vase clos, soutenue à coups de subventions agricoles ou industrielles, conçue non pour affronter les économies étrangères, mais pour « nourrir le soldat », avec tous les profits, routines, combines et coulages inhérents à une intendance. » La disparition de l’identité bretonne et des cultures populaires s’inscrirait dans projet logique : désincarner l’individu pour mieux le contrôler. Inquiétude qu’il exprime dans « Bretagne-patrie ou Bretagne-décors », dans les colonnes du Peuple breton de février 1968 : « Après quoi, le pays continua, entendez que la pression centralisatrice y poursuivit ses effets qui devaient normalement aboutir au malaise d’aujourd’hui, le Breton devenant un matériel humain anonyme et transférable tandis que la Bretagne restait un décor touristique, une sorte de « Chef d’œuvre en péril » dont il importe de préserver les ravissants clochers à jours. »
Disparu en 1970, Morvan Lebesque n’a pas connu la contestation politique et le revival culturel breton des années 1970, le basculement à gauche de la Bretagne, la victoire des socialistes en 1981 : des espérances, des réalisations et bien des aspirations déçues. Certains de ses écrits ont vieilli, d’autres restent d’une troublante actualité. Avec sa complexité, son humanisme très camusien, son refus farouchement libertaire de l’autorité et des instituions, Morvan Lebesque reste cependant une des grandes plumes progressistes et bretonnes du siècle passé. A redécouvrir et à relire sans modération.